L’aboutissement de décennies d’antisionisme suédois

L’aboutissement de décennies d’antisionisme suédois

Le mois dernier, la Ministre suédoise des Affaires étrangères, Margot Wahlstrom, a reporté sa visité prévue en Israël, à la suite du refus du Ministre israélien des affaires étrangères et de plusieurs autres officiels de haut rang de la rencontrer[1]. Ce refus israélien était une réaction à l’initiative du Gouvernement social-démocrate suédois de reconnaître l’Etat Palestinien, très peu de temps après son arrivée au pouvoir. L’attitude d’Israël peut aussi être perçue, cependant, à l’aune des décennies d’incitation à la haine anti-israélienne, de la part des sociaux-démocrates de Suède.

Le dernier Premier Ministre social-démocrate suédois, Olof Palme – assassiné en 1986 – a été un pionnier de l’incitation antisioniste. Il accusait Israël de pratiques nazies[2]. En 1984, le Vice-Ministre des affaires étrangères de Suède, Pierre Schori, s’est rendu en Israël. Il y a fait l’éloge d’Arafat et de sa “politique souple”. Dans un article, Schori prétendait que “les actes terroristes de l’OLP étaient quantité négligeable, tandis que les actes de représailles d’Israël étaient qualifiés “d’actes méprisables de terrorisme[3]”.

De façon surprenante, ce siècle s’est ouvert, cependant, sur un évènement très positif pour le peuple juif, en Suède. En janvier 2000, une conférence de premier plan sur l’enseignement de la Shoah y prenait fin. Le Forum International sur la Shoah à Stockholm était une initiative de Göran Persson, qui était, alors, Premier Ministre social-démocrate. Les dirigeants politiques de près de cinquante pays ont pris part à cette conférence. De nos jours encore, des représentants de dizaines de pays se réunissent régulièrement pour discuter de l’enseignement de la Shoah, de la recherche et de commémoration, dans le cadre d’une organisation inter-gouvernementale : l’Alliance Internationale pour le Souvenir de la Shoah[4].

Pourtant, Zvi Mazel, qui était Ambassadeur d’Israël à Stockholm, de décembre 2002 à avril 2004, déclare :”En dépit de l’attitude personnelle de Persson, il doit aussi porter une part de responsabilité pour la posture discriminatoire de son parti envers Israël. Depuis des décennies, les Sociaux-Démocrates ont tout fait pour contribuer à générer une atmosphère anti-israélienne. Il doit aussi prendre ses responsabilités pour le comportement de l’Agence Corporative de Développement International de Suède (SIDA), qui accuse Israël de tous les travers de la société palestinienne”.

Anna Lindh, dont une des fondations qui émane de l’OCIslamique  a repris le nom, à laquelle appartient, entre autres, Caroline Fourest.

Mazel ajoutait : “Une autre socialiste importante, la Ministre des Affaires étrangères disparue, Anna Lindh, avait pour habitude de faire un usage abusif des attaques les plus cruelles contre Israël. Sa haine d’Israël ne peut être décrite que comme quasiment pathologique. Sous sa férule, les Suédois ont, de tous les pays européens, publié le plus grand nombre de condamnations unilatérales contre Israël. Lindh a été poignardée en 2003 par un déséquilibré mental suédois d’origine serbe[5]”.

Celle qui a succédé à Lindh en tant que Ministre des affaires étrangères, Laila Freivalds, a visité Yad Vashem en juin 2004, apparemment pour honorer les Juifs assassinés. Puis, elle a, ensuite vertement critiqué Israël, lors d’une réunion avec le Ministre israélien des Affaires étrangères. Freivalds a gardé un silence religieux sur tout ce qui concerne la propagation de l’antisémitisme en Suède, dont l’essentiel provient de la communauté musulmane. Ce phénomène consistant à rendre les honneurs aux victimes juives de l’extermination, de critiquer Israël et d’ignorer ou de minoriser les délits majeurs envers les Juifs vivant dans son propre pays est monnaie courante en Europe. Le comportement de Freivalds  a, par la suite, été dénoncé par quatre anciens présidents de la communauté juive suédoise, qui ont écrit contre le racisme et l’antisémitisme rampant dans leur pays.

Ils ont envoyé une lettre au rédacteur en chef du Haaretz, dans laquelle ils résument ce qu’est l’antisémisme suédois contemporain. Cette lettre commence par remercier la Suède d’avoir accueilli les Juifs fuyant la Shoah, au cours de la Seconde Guerre Mondiale et le Premier Ministre Göran Persson pour avoir lancé le Projet d’Histoire Vivante.

Ces quatre dirigeants poursuivent, alors, en écrivant :

Le nombre d’agressions vérbales et physiques contre les Juifs ne cesse d’augmenter en Suède. Les adolescents à l’école apportent des preuves de la façon dont ils doivent cacher le fait d’être Juifs, alors qu’ils sont attaqués à la fois, verbalement et physiquement. Des enseignants témoignent que certains élèves refusent de participer à des cours où on étudie ce qu’est le Judaïsme. Les survivants mentionnent des sentiments de crainte. La police reste totalement passive, lorsque des extremistes attaquent des manifestants pro-Israël et antiracistes.

Ils ajoutent :

Au cours des dernières décennies, la Suède le centre mondial de la musique du Pouvoir Blanc, raciste et antisémite et plusieurs groupes politiques antisémites ont établi leurs sites internet en Suède pour y propager de la propagande antisémite. L’Eglise Suédoise vient juste de lancer une campagne de boycott [contre Israël], qui rappelle le boycott commercial des Juifs, dans diverses sociétés, par le passé[6].

On a assité à de vastes manifestations en Suède, au cours de l’Opération Plomb Durci de 2009. Des membres de tout premier plan parmi les Sociaux-Démocrates, à l’époque où le parti était dans l’opposition – ont pris part à des manifestations de haine contre Israël. Mona Sahlin, alors dirigeante du parti, a participé à un rassemblement à Stockholm[7], où flottaient des drapeaux du Hamas et du Hezbollah et où on a brûlé un drapeau israélien[8].

Jan Eliasson,, l’ancien Ministre des Affaires étrangères[9], et Wanja Lundby Wedin, Présidente de la Confédération des Syndicats Suédois[10], a aussi participé à cet évènement.

Wanja Lundby Wedin

La troisième grande ville suédoise par ordre d’importance, Malmö, est souvent mentionnée comme la capitale de l’antisémitisme européen. Les auteurs de nombreux actes antisémites qui y sont commis sont presque tous des Musulmans. Hannah Rosenthal, l’envoyée spéciale du gouvernement américain pour la lute contre l’antisémitisme, s’est rendue en visite dans la ville en 2012. Elle s’est exprimée sur les déclarations antisémites faites par le maire social-démocrate Ilmar Reepalu. Rosenthal a aussi souligné que sous la férule de ce maire, Malmö est devenu “l’exemple par excellence” du “Nouvel antisémitisme”, alors que le sentiment antisioniste sert de masque à la haine des Juifs[11]. Un nombre record de plaints contre des crimes de haine qui se sont déroulés dans cette ville, de 2010 à toute l’année 2011, n’ont conduit à aucune inculpation[12].

Il n’est, par conséquent, pas surprenant que l’importante étude de 2013, réalisée par l’Agence de l’Union Européenne sur les Droits Fondamentaux, démontre que 51% des Juifs suédois considèrent que l’hostilité envers les Juifs dans les rues ou les espaces publics représentent un problème plutôt grave à très grave. 34% des Juifs suédois évitent toujours de porter ou de montrer des objets qui permettraient de les identifier en tant que Juifs dans des lieux publics ; 26% l’évitent fréquemment. Ce sont les cas de figure les plus élevés pour tout pays couvert dans le cadre de cette étude. 22% sentient qu’ils sont constamment accusés ou blâmés à cause de ce que ferait Israël ; 27% dissent que cela servient fréquemment. 25% affirment que l’antisémitisme est un problème de première importance[13].

Les Sociaux—Démocrates suédois sont bien loin de constituer le seul exemple de la façon don’t les socialistes européens se sont fait les allies indirects des Islamonazis du Hamas. Ils en sont, cela dit, certainement l’une des tendancezs les plus prononcées.

Par Manfred Gerstenfeld

Le Dr. Manfred Gerstenfeld est membre du Conseil d’Administration du Centre des Affaires Publiques de Jérusalem, qu’il a présidé pendant 12 ans. Il a publié plus de 20 ouvrages. Plusieurs d’entre eux traitent d’anti-israélisme et d’antisémitisme.

Adaptation : Marc Brzustowski.

Notes  :

[1] Herb Keinon, Swedish FM postpones visit after Liberman declines to meet, 7 January 2015.

[2] Per Ahlmark, “Palme’s Legacy 15 Years On,” Project Syndicate, February 2001.

[3] Moshe Yegar, Neutral Policy – Theory versus Practice: Swedish-Israeli Relations (Jerusalem: Israel Council on Foreign Relations, 1993), 126-128.

[4] www.holocaustremembrance.com/

[5] Manfred Gerstenfeld, interview with Zvi Mazel, “Anti-Israelism and Anti-Semitism in Sweden,” in European-Israeli Relations: Between Confusion and Change? (Jerusalem: Jerusalem Center for Public Affairs, Adenauer Foundation, 2006), 170-180.

[6] Salomo Berlinger, Stefan Meisels, Torsten Press, and Willy Salomon, “Sweden Can Do Much More for Country’s Jewish Community,” Haaretz, 10 June 2004.

[7] Per Gudmundson, “Mona Sahlin, hakkorsen och Hamasflaggorna,” Gudmundson, 15 January 2009.

[8]  “Israelska flaggan brändes,” Dagens Nyheter, 10 January 2009. (Swedish)

[9] Per Gudmundson, “Rödflaggat,” Gudmundson, 13 January 2009. (Swedish)

[10] Per Gudmundson, “Swedish Leading Social Democrats in Rally with Hezbollah Flags,” Gudmundson, 10 January 2009. (Swedish)

[11] Cnaan Liphshiz, “In Scandinavia, kipah becomes a symbol of defiance for Malmo’s Jews,” JTA, 24 September 2012.

[12] Cnaan Liphshiz, “In Malmo, record number of hate crimes complaints but no convictions,” JTA, January 9, 2013.

[13] “Discrimination and hate crime against Jews in EU Member States: experiences and perceptions of anti-Semitism,” European Union Agency for Fundamental Rights, 2013, 19.

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